Encore confidentielles, certaines drogues bénéficient d’un véritable effet de mode auprès des adolescents et des jeunes adultes. Avec, la plupart du temps, des conséquences désastreuses.
Les nouvelles drogues « tendance »
A Miami, le 26 mai dernier, un individu complètement nu a été abattu par la police alors qu’il était occupé à dévorer en plein jour le visage d’un SDF. Cette scène de cannibalisme d’une violence inouïe a mis en lumière les troubles du comportement liés à la consommation d’une nouvelle drogue très populaire chez les adolescents américains et anglais : les « sels de bains ».
Cette drogue « bon marché » (entre 30 et 55 $ pour 50 mg) est vendue dans de petits sachets colorés ludiques et elle prend la forme de poudre ou de petits cristaux (d’où son surnom).
Elle peut se consommer de multiples façons (inhalation – y compris en fumant, injection, et ingestion).
Les autorités médicales sont très inquiètes car les sels de bain constituent un cocktail chimique explosif composé notamment de stimulants à base d’amphétamines et de dérivés du quat (un stupéfiant qui supprime la sensation de faim et de fatigue). Au-delà de la sensation d’euphorie, cette drogue procure des hallucinations aussi puissantes que l’ectasy ou le LSD. Le consommateur est donc complètement déconnecté de la réalité, en proie à des crises d’hystérie et à un délire de persécution.
Dans un entretien accordé au Figaro, le Pr Michel Lejoyeux explique que l’essor de ces produits de synthèse est directement lié aux avantages procurés aux trafiquants. « Ces drogues sont plus faciles et moins chères à produire car, contrairement au cannabis, elles ne nécessitent pas de culture. Il suffit d’avoir des connaissances en chimie et un atelier clandestin. » souligne ce spécialiste de psychiatrie et d’addictologie à l’Université Paris VII.
Une autre drogue chimique, le 5-IT, serait ainsi à l’origine du décès de 14 jeunes suédois âgés d’une vingtaine d’années.
Le développement de la polyconsommation
Les différentes réglementations étatiques visant à contrôler la composition des médicaments et à interdire la vente de drogues sont totalement inopérantes sur Internet. Anders Persson, chercheur à l’Institut national suédois de santé publique, constate que plusieurs substances très nocives sont ajoutées dans les produits chimiques vendus à l’insu des acheteurs. De même, de grandes variations dans les dosages recommandés apparaissent selon les forums ou les chats consultés par les jeunes.
Mais stigmatiser Internet serait une erreur. En Europe par exemple, la plupart des drogues vendues en ligne font l’objet d’une législation différente selon les pays selon la perception de leur dangerosité : les Pays-Bas autorisent les kits de culture de champignons magiques, le Portugal a dépénalisé l’acquisition et la consommation de cannabis,…
Le danger vient donc essentiellement des drogues chimiques, parfois fortement hallucinatoires, qui sont revendues le plus souvent dans les espaces festifs (boîtes de nuit, rave….). Actuellement la grande tendance est de consommer plusieurs drogues pour neutraliser les éventuels effets négatifs indésirables. Ainsi, après l’excitation et la fébrilité apportés par les amphétamines et tous les stimulants (cocaïne, speed…), la descente est contrôlée par la prise de substances anesthésiques aux effets relaxants. Les jeunes se comportent ainsi comme de véritables consommateurs, passant d’une drogue à l’autre en fonction de leurs besoins. Les conséquences physiques et psychologiques (dépression) sont totalement occultées, alors qu’elles sont pourtant aggravées par ce type de comportement.
L’absence de structure préventive adaptée
Selon l’Observatoire français des drogues et de la toxicomanie, il est désormais possible d’ordonner aux personnes interpellées pour détention et usage de stupéfiants d’effectuer un stage de sensibilisation aux dangers de ces drogues. Cette action à visée pédagogique est surtout indiquée lors du premier usage de stupéfiant afin de prodiguer une réponse pénale adaptée au profil du consommateur de drogue.
Mais les conclusions du rapport d’évaluation du dispositif publié en juin 2012 montrent clairement la carence de structures à destination des mineurs. « Près de 73 % des associations porteuses de stages visent uniquement un public majeur, 25 % ciblent à la fois des majeurs et des mineurs et seulement 2 % sont spécialisées dans l’accueil de mineurs (exclusivement des associations socio-judiciaires). Près de la moitié des cours d’appel sont ainsi dépourvues d’une offre de stages accessible aux mineurs (16 sur 35). Cette focalisation de l’offre sur le public majeur s’est renforcée au fil du conventionnement. »
Dans ce contexte, les débats sur la dépénalisation voire la légalisation du cannabis (surtout médical) prennent tout leur sens. Encadrer la distribution dans une officine d’état ou dans un smartshop agréé permettrait de créer un lien avec les jeunes, de faire de la prévention et d’aboutir à une consommation sûre et contrôlée.