L’exposition aux poussières de bois représente un fort enjeu de santé publique au travail.
De nombreux cas de cancers du nez sont aujourd’hui reconnus comme maladie professionnelle.
Un risque sanitaire parmi d’autres auxquels sont exposés les travailleurs du bois…
Moins connues que l’amiante ou les pesticides, les poussières de bois sont pourtant la deuxième cause de cancer lié au travail.
Chaque année, 70 à 80 personnes ayant travaillé le bois durant leur vie voient leur cancer du nez ou des sinus reconnu comme maladie professionnelle par la Sécurité sociale.
Les poussières de bois sont en effet classées « cancérogènes avérés » par le CIRC (Centre international de recherche sur le cancer) pour les tumeurs du nasopharynx, des fosses nasales et des sinus de la face. Selon l’Institut de veille sanitaire (InVS), près de la moitié de ces cancers seraient attribuables en France à une exposition professionnelle aux poussières de bois.
Le carcinome des fosses nasales, de l’ethmoïde et des autres sinus de la face est désigné comme maladie professionnelle par les tableaux 47 du régime général et 36 du régime agricole de la Sécurité sociale. Il s’agit de cancers relativement rares (avec une incidence annuelle en France de 0,9 à 1,5 pour 100 000 personnes), mais de mauvais pronostic, en raison d’un diagnostic souvent tardif, en moyenne à l’âge de soixante ans, souvent longtemps après les années d’exposition. Le risque de développer un adénocarcinome naso-sinusien est d’autant plus important que la durée et l’intensité de l’exposition aux poussières de bois ont été importantes. Elle augmente également avec le délai écoulé depuis le début de l’exposition.
Les travailleurs du bois en première ligne
Les microparticules sont émises lors d’opérations de transformation du bois (abattage, sciage, broyage), d’usinage de bois bruts ou de panneaux de bois (tournage, perçage, ponçage), de transport de copeaux et de sciures, ou encore de finition (application de peintures, vernis, lasures, etc.). Ces poussières de bois peuvent être inhalées par les personnes exposées dans le cadre de leur travail et être à l’origine de graves maladies de l’appareil respiratoire, y compris des dizaines d’années après l’exposition.
Industrie du bois, menuiserie, construction, ameublement, BTP… Au total, près de 400 000 salariés seraient exposés à ces dangers selon l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité), dont la moitié dans le secteur du bâtiment. Pour ces « travailleurs du bois », « la menace est là, dans l’air, tous les jours », souligne l’institut dans ses campagnes de sensibilisation à destination des entreprises.
En quelques jours, les microparticules de bois peuvent s’attaquer à la peau ou aux voies respiratoires et provoquer de l’eczéma, des conjonctivites ou de l’asthme. Après des années d’exposition, des tumeurs peuvent de développer dans le nez et des lésions graves peuvent se former dans les poumons et induire des fibroses pulmonaires.
Les travaux exposant aux poussières de bois figurant sur la liste des procédés cancérogènes, des mesures de prévention particulières (captage des poussières à la source, ventilation, recyclage de l’air, etc.) et un suivi médical renforcé sont applicables aux travailleurs concernés selon le Code du travail. De plus, les poussières de bois ont une valeur limite d’exposition professionnelle (VLEP) réglementaire sur huit heures de 1 mg/m3. Le contrôle du respect de cette VLEP est effectué par un organisme accrédité au moins une fois par an, tout dépassement entraînant l’arrêt de travail aux postes exposés et la mise en œuvre de mesures de prévention adaptées.
Incendies, risques chimiques et polluants biologiques
Outre ces risques respiratoires, les poussières de bois représentent également des risques importants d’incendie et même d’explosion. Le bois s’enflamme en effet d’autant plus facilement que ses poussières sont fines. Les copeaux constituent ainsi un combustible à inflammation très rapide. Quant aux poussières, très fines, quand elles sont en concentration suffisante, elles peuvent s’enflammer si rapidement que la combustion devient alors une véritable explosion.
C’est pourquoi le Code du travail impose un certain nombre de règles dans des locaux où sont émises des poussières de bois. Il est ainsi totalement interdit de fumer. Aucune source d’ignition ne doit être présente. Les postes de travail doivent se trouver à dix mètres maximum d’une issue ou d’un local donnant sur l’extérieur. Et aucun dépôt ne doit se trouver dans et sous les escaliers, dans les couloirs et passages et à proximité des issues. Compte tenu du risque d’explosion lié aux poussières de bois, les dispositions ATEX relatives aux atmosphères explosives s’appliquent.
Les personnes qui travaillent sur ce matériau sont également exposés à de nombreux produits chimiques et notamment à des composés organiques volatils (COV) qui peuvent avoir des effets néfastes pour la santé et dont certains sont même classés comme perturbateurs endocriniens ou substances cancérogènes.
Le bois émet en effet naturellement des COV comme le formaldéhyde ou les terpènes. Il subit également divers traitements chimiques contre le feu, l’humidité, les champignons, les insectes… Il est assemblé avec des colles et des résines, puis se voit appliquer des vernis, des cires, des laques ou des peintures… Autant de produits chimiques qui figurent parmi les principaux émetteurs de COV.
Enfin, le bois peut également servir de milieu nutritif et de développement à toutes sortes de micro-organismes, bactéries, champignons et autres insectes xylophages, qui peuvent avoir également un fort pouvoir allergène. Des polluants biologiques qui s’ajoutent aux effets des composés chimiques présents dans l’air. « Vengeance » de la nature ou non, il semble bien qu’il n’y ait que dans les forêts que l’arbre soit inoffensif, sans compter bien évidemment les victimes de chute d’arbres.
Participation de Gilles B.